Selon une étude publiée par l’Observatoire national de l’agriculture (Onagri), en février 2020, le marché international de l’huile d’olive a connu un grave déséquilibre entre l’offre et la demande, ce qui a induit une chute des prix sur un marché caractérisé par deux récoltes successives importantes en 2018-2019 et 2019-2020, et un niveau de stock déjà élevé.
En effet, à fin décembre 2019, la Commission européenne a estimé à 3,121 millions de tonnes la production mondiale d’huile d’olive pour la campagne 2019/2020. L’Union européenne reste le premier producteur, avec 70% de la production mondiale. Les perspectives de la production dans l’UE devraient atteindre environ 1,989 million de tonnes d’huile d’olive pour la campagne 2019/2020 enregistrant ainsi une baisse de 12% par rapport à la campagne 2018/2019 (2,264 millions de tonnes). En ce qui concerne les autres zones géographiques — en dehors de l’UE — la Commission européenne estime à environ 1,133 millions tonnes la production totale, enregistrant ainsi une hausse de 24% par rapport à la campagne précédente due principalement à la hausse de la production en Tunisie avec 300 mille tonnes (+150%), la Turquie avec 225 mille tonnes (+16%) et 608 mille tonnes pour le reste des pays producteurs (601 mille tonnes en 2018/2019).
Le stock reste élevé
Le stock mondial reste élevé et frôle les 827 mille tonnes, au 30 septembre 2019, dans l’Union européenne (dont 88% en Espagne), en hausse de 61,8% sur un an et de 166,8% sur deux ans. Ainsi, l’offre mondiale d’huile d’olive a augmenté cette année de 3 892 M t à 4 141 M t, soit une augmentation de 6,4%.
Selon le COI, la consommation mondiale a enregistré aussi une légère hausse de 6%, passant de 2909 mille tonnes en 2018/2019 à 3094 mille tonnes en 2019/2020. Toutefois, on observe une augmentation du décalage entre l’offre et la demande.
Cette situation de crise sur le marché mondial a impacté directement le marché tunisien, marqué lui-même par une production abondante (estimée à 350 mille tonnes par le ministère de l’Agriculture) et un niveau d’exportation figé, puisque les exportations vers l’UE seraient à un niveau avoisinant 127 mille tonnes (57 mille tonnes sous régime de quota et environ 70 mille tonnes sous régime TPA), similaire à 2017/2018 et un potentiel d’export de l’ordre de 93 mille tonnes, pour les destinations hors UE.
En conséquence, les exportations espérées ne dépasseront pas un volume de 220 mille tonnes ce qui représente 63% de la production espérée. Par ailleurs, la demande sur le marché national est caractérisée par un niveau de consommation équivalente à 44 mille tonnes (une consommation par habitant de l’ordre de 3,8 kg).
Les prix en baisse
Cette consommation pourrait s’accroître de 50% à 100%, grâce à la forte baisse de prix contribuant ainsi à absorber une partie de l’excédent non exportable (environ 88 mille tonnes).
En effet, les prix des olives provenant de Sfax ont encore baissé à la date du 3 février 2020. Ils varient de 0,750 DT par kg (prix minimal) et 0,850 DT par kg (prix maximal), soit une baisse d’environ 50% par rapport à la même période de l’année précédente. Toutefois, la concentration de la production en une courte période nécessite une régulation d’urgence du marché.
«En vue de contribuer à stabiliser le marché et à prévenir d’autres dommages pour le secteur oléicole européen, la Commission européenne a autorisé, lundi 11 novembre 2019, une aide au stockage privé pour les huiles d’olive vierge et lampante (ce dernier était inclus lors de deuxième appel d’offres sous la pression de l’Espagne). La procédure se déroule par appels d’offres dans les Etats membres producteurs (Grèce, Espagne, France, Croatie, Italie, Chypre, Malte, Portugal, Slovénie). En effet, le règlement fixe une quantité minimale par offre de 50 tonnes, mais n’établit pas de quantité maximale de stockage, afin de fournir au système une flexibilité et une efficacité maximales.
La période de stockage est fixée à 180 jours, durant laquelle l‘huile ne peut être commercialisée, en vue de garantir un réel équilibre entre l’offre et la demande dans le temps. Le volume total proposé à l’aide pour le stockage avoisine 206 mille tonnes. En novembre 2019, seuls 3% du volume offert ont été autorisés au prix de 0,83 euro la tonne par jour.
Conséquences désastreuses
En revanche, l’augmentation de l’aide à 1,1 euro par tonne d’huile d’olive a permis de stocker 18% du volume soumis aux enchères. Au total, avec les deux périodes, Bruxelles a autorisé le stockage de 21 279 tonnes, sur les 206 000 tonnes proposées.
A la date de 03/2/2019, les quantités de l’ensemble des trois offres détenues à ce jour totalisent 170 909 tonnes, dont 95,6% correspondent à la catégorie lampante et le reste aux catégories d’huile d’olive vierge (3,9%) et extra-vierge. Cela signifie une aide au secteur de l’huile d’olive espagnole qui s’élève à 23,9 millions d’euros.
La situation délicate au niveau de l’UE a engendré des conséquences désastreuses sur les transactions de l’huile d’olive à l’échelle nationale.
En effet, les prix de référence de l’huile d’olive ont chuté d’une manière significative en réponse à la diminution considérable des prix à l’exportation (7,08 DT/kg pour l’extra-vierge en vrac et 5,14 DT/kg pour l’huile d’olive lampante en vrac exporté vers l’Espagne au mois de décembre selon la Douane). Afin d’éviter l’effondrement des prix à l’échelle nationale, l’Office national de l’huile (ONH) a obtenu une garantie de l’Etat de 100 millions de dinars afin de renforcer ses capacités d’intervention sur le marché intérieur pour l’acquisition de quantité d’huile d’olive (20 mille tonnes environ) qui vient s’ajouter à l’enveloppe de 50 MDT octroyée à l’ONH le 20 novembre 2019.
Une autre décision ministérielle a été prise et qui consiste à rééchelonner des crédits contractés par les triturateurs tout en supprimant les intérêts de retard, appliqués sur les crédits bancaires octroyés aux propriétaires d’huileries et aux exportateurs d’huile d’olive, qui ont fait face, durant les deux dernières campagnes, à des difficultés financières.
De plus, l’Etat a eu recours au mécanisme de soutien via un taux d’intérêt préférentiel (moins 3 points que le taux normal) dédié aux oléicultures demandeurs de prêts bancaires.